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Studi e ricerche

Le Corporatisme de l’État Nouveau Portugais. Un débat sur l’institutionnalisation économique de la Nation

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Abstract
This article aims to discuss the nature of the Portuguese corporatist experience built under the so called «New State» (1933-1974). Using some primary sources and theoretical bibliography on the Portuguese corporatist system, the article examines how the corporatist ideology was expressed in the building process for a «national corporatist economy». Above this question, facing the common propaganda used by the dictatorship regimes on their economic nationalism, we debate the political links between the Portuguese dictatorship institutions and the economic “corporatist organization”.

Le corporatisme comme objet historiographique

Cet article s’inscrit dans un débat d’une grande tradition théorique qui a un rapport avec les études des corporatismes historiques du XXème siècle. Le cas portugais, ou le «mode portugais pour le corporatisme» (Serapiglia 2011) a profité  d’une progressive inclusion dans un contexte comparatif internationale. Toutefois, la dimension économique du système corporatif portugais institutionnalisé par le régime dictatorial de l’«État Nouveau» a reçu peu d’attention. Cet essai a pour objectif l’interprétation des significations idéologiques du procès de l’institutionnalisation d’une «économie nationale corporative» invoquant le contexte de crise internationale du système capitaliste et quelques débats du champ de l’économie politique. On prétend, aussi, débattre les relations entre la construction politique d’un État corporatif et la construction institutionnelle d’une organisation corporative essentiellement économique et sociale.

Dans les pays du Sud de l’Europe qui ont connu des régimes autoritaires d’inspiration fasciste, le terme corporatisme est devenu hyper référentiel du point de vue sociologique et sous-analysé du point de vue historique.

À ce déséquilibre concourent, certainement, des appropriations légères de la mémoire des “corporatismes historiques: d’une part, le caractère néo-corporatif de la plupart des régimes démocratiques européens dans lesquels la concertation des intérêts occupe une place privilégiée sur la scène sociale et politique (Schmitter 1979, 85-131; Cotta 2008); d’autre part, la filiation de valeurs sociales et de comportements de divers groupes professionnels ou d’intérêt suivant une tradition corporative très enracinée dans la société portugaise; un vice culturel acquis prétendument lors de la longue expérience du corporatisme salazariste qui a eu lieu entre 1933 et 1974 [1].

L’étude du corporatisme autoritaire européen du XXème siècle exige un effort comparatif, afin d’effectuer des interprétations cas par cas et d’État à État (Musiedlak 2010; Dard 2011). L’analyse des expériences historiques d’implantation des systèmes corporatifs nous paraît être une méthode fondamentale afin d’estomper les explications généralisatrices de la Science Politique, toujours trop préoccupée à établir des taxonomies. Une autre voie méthodologique – et aussi une autre précaution épistémologique – réside dans le besoin de tempérer la dogmatique doctrinaire et l’idéologie politique du corporatisme avec un effort d’interprétation de ses finalités instrumentales et de compréhension des singularités nationales des systèmes politiques qui se sont réclamés “corporatifs”.

Pour ce thème comme pour d’autres thèmes de recherche historique qui exigent la distinction entre le discours de l’action, il importe de situer notre perspective d’analyse et d’ébaucher une problématique qui, par rapport à la densité doctrinaire des discours qu’elle comporte et les pièges de la propagande, exige des soins herméneutiques spéciaux. Une bonne voie d’étude, encore peu empruntée, est celle qui consiste en comparer entre eux, ou entre les diverses expériences nationales corporatistes, les usages politiques de l’idée corporative et des appareils bureaucratiques et institutionnels qui se sont basés sur elle afin d’atteindre, entre autres, les suivantes finalités politiques: réorganiser l’économie libérale d’après les intérêts de l’État autoritaire et de ses oligarchies; ordonner la société de façon à prévenir le désordre public et les mouvements sociaux hostiles; imposer des systèmes d’intermédiation d’intérêts afin de réguler les relations entre le public et le privé dans le cadre d’institutions fortement contrôlées par l’État.

Mettre en évidence l’usage politique et institutionnel du corporatisme implique de considérer les systèmes corporatifs comme des systèmes de “troisième voie” (Torgal 2009, 49-79), en ayant foi dans son expression doctrinale. Mais cela exige aussi de privilégier de façon analytique le facteur organisation, principal impératif doctrinaire des corporatistes, comme si l’organisation corporative était une force autonome qui, par la main de l’État, finirait par diriger les facteurs de production et les propres relations sociales (Pereira 1937, 108) [2]. L’organisation corporative, avec toutes sortes d’organismes qui en ont fait partie, fût la création institutionnelle des États corporatistes la plus notoire et innovatrice, en vue de domestiquer le capitalisme, en compartimentant les intérêts et en imposant la collaboration entre le “capital” et le “travail” sur le plan national.

Tracer l’histoire du corporatisme oblige ainsi à des efforts redoublés dans l’examen des authenticités. Thème ingrat et très marqué par les vicissitudes de la mémoire historique, étant donné l’association qui s’est toujours établie entre l’idéologie corporative et les régimes fascistes, qui oblige à discerner les obscures relations entre la conscience et l’action.

La théorie, la doctrine, les lois et les plus divers documents qui évoquent le quotidien bureaucratique des organismes qui ont fonctionné sous l’égide du système corporatif, composent un étonnant torrent discursif. Il s’agit d’un immense torrent de méta-sources, pas toujours clarificateur du quotidien des institutions et des vicissitudes du “corporatisme réel”. Ces séries de documentations à caractère institutionnel, lorsqu’elles ne se sont pas perdues dans les labyrinthes des transitions politiques et des réformes de l’État, paraissent avoir été destinées à persuader les contemporains du système corporatif à propos des vertus de l’«idée du siècle» – ainsi a dénommé Mihaïl Manoïlesco le «corporatisme intégral et pur» [3] quand il l’a déclaré l’unique système d’idées capable de résoudre la “question sociale” héritée du XIXème siècle.

De l’autre côté de l’“objet” de notre article, souvent inaccessible par la voie des sources, demeurent les institutions politiques, économiques et sociales créées sous la doctrine corporative – soit, le système et l’organisation, des réalités qui ne coïncident pas du tout.

Les incohérences entre la théorie et la pratique, les contradictions et les déviations des corporatismes historiques de l’Europe d’entre-guerres, en général, et du système corporatif portugais institué par l’État Nouveau, en particulier, ont été identifiées par des historiens, des sociologues et des politologues.

Dans le cas portugais, de telles évidences contradictoires se sont montrées réconfortantes pour l’entendement du corporatisme en tant que système, mais peu stimulantes pour l’étude historique de son expérience concrète. Notamment, en ce qui concerne l’action quotidienne et l’impact structurel de la myriade d’organismes corporatifs et para-corporatifs imposées aux forces vives de la “nation”, à partir de 1933. L’empire de l’idéologie, les interminables textes doctrinaires et l’obsession historiographique à apurer dans quelle mesure le dogme corporatiste à engendrer un système politique et de représentation d’intérêts réellement corporatifs, paraissent inhiber l’analyse des usages économique de l’idée corporative et l’étude de ses impacts sociaux. Pour cela, il faut encore étudier la pratique des institutions corporatistes – ou du moins des principales, en guise d’échantillon –, faire la cartographie des secteurs économiques où elles furent instituées de mode vertical et horizontal et typifier leurs impacts.

Dans les limites de ce texte, nous proposons un débat préliminaire sur cet agenda de recherche, tout spécialement sur les sens de “l’économie corporative portugaise”, expression très commun chez les corporatistes lui-même, mais toujours ambigüe. On souhaite faire une introduction au thème et aux problématiques qu’il renferme, exercice basé sur deux questions : Comment étudier la sémantique corporative, en construisant sa propre herméneutique, cela veut dire, en vainquant leurs périls de discours et leurs illusions doctrinaires? Comment renouveler l’étude historique du “corporatisme portugais”?

Le corporatisme portugais – herméneutique d’une fraude historique

Philippe Schmitter, dans son bien connu essai rédigé dans les années soixante-dix du XXe siècle, a averti sur la tentation d’ignorer le corporatisme portugais pour le simple fait qu’il a été «anachronique et insignifiant» (Schmitter 1999, 166). «Si nous le faisions», ajoute le sociologue américain, «nous irions à la rencontre de ceux qui sont déjà parvenus à la conclusion que l’État corporatif de Mussolini n’était rien d’autre qu’une bourde, ainsi que de ceux qui insistent à prendre le corporatisme au sérieux comme s’il s’agissait d’un authentique tertium genus entre le capitalisme et le socialisme».

Ni l’un ni l’autre, certainement. En vérité, le corporatisme portugais – qui s’est toujours annoncé “associatif” ou “autodirigé” – fût une fraude: en premier lieu, car il n’a simplement existé qu’en tant que “corporatisme d’État”, comme divers auteurs l’ont conclu et, avant eux, quelques doctrinaires du système lui-même; ensuite, parce que les corporations, organes de sommet d’un véritable système corporatif, ont pris plus de vingt ans à être créé et lorsqu’elles le furent (en 1956-57) elles ont peu fonctionné ; finalement, parce que le caractère corporatif de l’État Nouveau, solennellement transposé dans la Constitution portugaise de 1933, ne fût qu’une velléité, résultant du besoin de trouver un mobile modérément révolutionnaire pour le nouveau régime.

En fin de compte, plus qu’une idéologie de légitimation destinée à remplir le vide de l’indécise Dictature Militaire de 1926-1933, après la Première République Portugaise, le corporatisme a très tôt démontré ce qu’il était et ce qu’il souhaitait : un dispositif de consolidation du régime autoritaire, un recours de domination et d’arbitrage d’intérêts, un précieux instrument de rangement de «l’économie nationale» (Rosas 1996, 268-274; Madureira 2002, 31-71). D’une économie nationale dite “corporative”, mais dominée par diverses formes de régulation économique étatiques. Au sein de cet interventionnisme dirigiste ressortaient les organismes de coordination économique, éléments de l’administration indirecte de l’État qui, bien qu’étant annoncés comme provisoires et dans cette mesure “pré-corporatifs”, ont fini par avoir une vie plus longue que les propres organismes corporatifs. L’organisation corporative portugaise a fini par n’être qu’un mode marginal de régulation, un instrument auxiliaire de la coordination économique étatique.

Face à ces arguments, il serait justifiable que les historiens cultivent un certain dédain envers le thème du corporatisme. Mais en réalité, dans le cas portugais le corporatisme fût une “fraude”, mais une “fraude” de grande importance historique dans la mesure où le système et l’organisation ont persisté tant que le régime a duré. C’est-à-dire: parce que au nom de l’“État corporatif” furent créées des cents d’institutions officielles d’organisation de la vie économique et sociale de la nation qui, dans la plupart des cas ont existé et fonctionné durant près de quarante ans [4].

Sans contrarier ces raisonnements, Manuel de Lucena a souligné que «l’accent tonique de l’organisation corporative portugaise est dans l’économie, qui bat et de loin tous les autres secteurs organisés» (Lucena 1976, 162).

Le jugement est clair et juste quoiqu’il résiste à la preuve empirique. Le Portugal a connu une organisation économique étatique de suggestions corporatives très en delà de ce qui était annoncé “État Corporatif”, qui a servi à réprimer des conflits sociaux de classes et à prévenir la confrontation ouverte des intérêts. “L’État d’ordre portugais” – libéral dans l’économie, antilibéral dans la politique – a trouvé dans les idées et les institutions corporatives une action dilatoire afin de s’ériger et de durer. Il nous semble donc plus rigoureux de considérer que l’État Nouveau a créé et imposé un ordre économique corporatif.

Il importerait de discuter pour quelles raisons ces évidences et l’appel d’étude qu’elles supposent n’ont pas alimenté plus de recherches sur le corporatisme économique salazariste. À l’instar d’autres problématiques de l’historiographie consacrée à l’État Nouveau portugais, les études sur le corporatisme ont aussi commencé par les grandes synthèses sans qu’aient été effectués des travaux préalables d’analyse, des essais sectoriels ou même monographiques [5].

Le “corporatisme économique portugais” – attenons-nous à cette perspective un tant soit peu réductrice, mais néanmoins plus proche de la réalité historique invoquée – suppose une immense pelote, composée de beaucoup de lignes emmêlées: Théorie, Doctrine, Lois, Institutions, Politique, Économie, Société... Et il serait possible, encore, de désagréger le terme corporatisme et ses historiques réalités en tant d’autres catégories analytiques: Idéologie, Système, Organisation, Intérêts.

Derrière cette diversité théorique, bien entendu schématique mais assez exprimée à travers l’innombrable production de textes construits par les corporatistes eux-mêmes (qu’ils fussent des doctrinaires connus préoccupés de l’authenticité du système, qu’ils fussent d’obscurs compositeurs de vulgates de “l’idée corporative”), ils revisitent certaines questions essentielles. Des questions pas très nouvelles, il est certain, mais important pour la compréhension du contexte historique d’application des idées corporatives: les liens qui se sont établis entre la “question sociale” et la “crise de l’État libéral” dans la conjoncture internationale de problèmes économiques et financiers qui ont accompagné la Grande Guerre et une bonne partie des années vingt ; les relations entre le nationalisme, le fascisme et le corporatisme; l’avent de l’interventionnisme économique étatique lié à l’administration publique des subsistances, de la vie économique en général et à la définition de politiques déflationnistes dans l’après-guerre; en dernier, l’État libéral (monarchies parlementaires ou républiques) face au besoin d’intervenir dans les systèmes d’intermédiation d’intérêts, sur les groupes organisés et les oligarchies économiques – la reconstitution des relations entre public et le privé en tant que pilier de la reconstruction autoritaire ou totalitaire des États.

Avec une expression illustratrice du sens pragmatique avec laquelle l’idée corporative a servi le projet de reconstruction de l’État (l’édification de «l’État Nouveau»), Salazar a suggéré en 1933 qu’une des tâches de la «République corporative» serait d’amarrer les intérêts à l’État pour reconstituer l’autorité publique.

Dans le cas portugais, la thématique du système corporatif fût l’une des premières à contribuer à une historiographie de l’État Nouveau et à l’entendement de son architecture politique et institutionnelle. Toutefois, l’analyse historique des processus d’institutionnalisation de la théorie et de la doctrine corporatives continue à être réduite et intermittente, comme s’il s’agissait d’un thème poussiéreux ou “mineur” pour l’historiographie moderne de l’État Nouveau. 

Une simple recherche bibliographique met en évidence une claire prédominance d’études sur le corporatisme en tant que système politique et idéologique, une perspective spécialement soignée dans les essais de Schmitter. Plus rares sont les travaux consacrés au corporatisme en tant que système économique et institutionnel de conduite de la vie économique et sociale, soit, d’étatisation nationale de l’économie et de la société elle-même. Faisons exception aux écrits de Manuel de Lucena, qui conjuguent la perspective politique, juridique et institutionnelle et réunissent de précieuses intuitions interprétatives sur d’autres faces du système corporatif portugais. Sur le plan de la théorie économique et de la doctrine qui lui est associée, il faut mettre en exergue les synthèses de J. M. Brandão de Brito, Carlos Bastien et, plus récemment, les essais de José Luís Cardoso (Brito 1989, 67-131; Bastien and Cardoso 2007, 120-127). 

Pour le moment, ce qui nous intéresse c’est de partager un ensemble de réflexions capables de cerner le problème historiographique du corporatisme portugais et, à partir delà, ébaucher un programme de recherche sur l’“économie nationale corporative” entre 1933 et 1974 – idéologie, circonstances et institutions.

Certaines questions préalables que nous nous posons trouvent une réponse consistante dans l’historiographie internationale relative aux fascismes que l’on a aussi réputés corporatifs. Le programme d’études est trop vaste, mais indispensable à la compréhension du contexte de formation des “corporatismes historiques”, ainsi que le recours à des appareils institutionnels d’inspiration corporatiste pour subordonner l’économie et la société à la sphère de la politique – à l’État investi en gardien de “l’intérêt national”.

On peut dire la même chose de l’historiographie portugaise relative à l’État Nouveau, dont le démarrage, encore en plein “marcélisme” – une coïncidence qui vaut la peine d’être exploitée et qui, dans certains cas, n’a pas échappé à la tendance néo corporatiste qui a marqué les social démocraties de cette époque – a élu la problématique du corporatisme comme priorité. Non seulement parce qu’une bonne partie des sources historiques étaient (et sont) composées par des Lois, une documentation relativement facile à réunir et à consulter – c’est d’ailleurs l’option de Manuel de Lucena dans son mémoire de fin d´études présenté à l’Institut des Sciences Sociales du Travail de Paris, en 1971, publié en 1976 – et de Philippe Schmitter, qui en 1971 est venu au Portugal afin d’étudier, selon le sociologue américain lui-même, «un cas de paléontologie politique» : le «corporatisme d’État» portugais qui, bien qu’imposé dans les années 30, a survécu à l’épilogue de la Seconde Guerre Mondiale et résisté à la mort de Salazar, y compris avec des promesses de réforme dans le cadre de «l’État Social» imaginé par Marcello Caetano.

L’État Nouveau: une République corporative, une économie nationale corporative

Le caractère corporatif de l’État Nouveau a toujours été considéré, aussi bien par les doctrinaires du système, que par ceux qui l’ont pris comme matière d’étude, comme principale singularité du “fascisme portugais”.
En guise d’argument, il suffit d’énoncer deux faits; un de nature discursive ; l’autre d’ordre pratique, d’ailleurs structurant de l’organisation économique et sociale que l’État Nouveau a modelée suivant les influences étrangères et a imposé à la Nation afin d’organiser et de subordonner:
1) La proclamation constitutionnelle de l’État comme «République unitaire et corporative» (article 5 de la Constitution portugaise plébiscité en 1933);
2) L’annonce constitutionnelle et para-constitutionnelle du modèle économique corporatif [6] ; soit la formule doctrinaire de l’«économie dirigée», solution politique de la “troisième voie” entre le collectivisme socialiste et le libéralisme individualiste;

À la fin de cette discussion, c’est le corporatisme économique, ou la mobilisation de la théorie et de la doctrine corporatives pour l’expérience historique de l’institutionnalisation de l’«économie nationale de base corporative» (Ribeiro 1939, 12) définie par Salazar en 1933 qui importe de considérer.

Certains idéologues du système portugais, à l’instar de Teixeira Ribeiro, et la propagande elle-même, ont préféré l’expression plus réaliste d’«économie dirigée» afin de désigner la solution politique de synthèse – non proprement de dépassement – entre le libéralisme et le socialisme. À notre avis, le corporatisme portugais n’a pas créé une économie corporative autodirigée, mais une économie dirigée ou une économie institutionnalisée à suggestions corporatives.

Parallèlement à la liquidation du syndicalisme libre et de la corporativisation du “travail national”, taches commencées en 1933, la discipline des marchés et l’organisation compulsive des secteurs économiques les plus atteints par la crise internationale, ou plus à même de réclamer la protection de l’État, furent les priorités du “plan corporatif” de Salazar. Ce processus sinueux s’est opéré, surtout, à travers la cartellisation corporative, une contradiction de termes, vu que la doctrine a toujours annoncée une société organisée en corporations à caractère non public, soit, composée par des organes de sommet constitués moyennant l’initiative des intéressés, en bonne communion entre le “capital” et le “travail”.

Dans la pratique, la corporativisation de l’économie portugaise ne s’est jamais vérifiée. Il n’y a pas eu une économie corporative portugaise sur le plan théorique; elle n’a pas non plus existée sur le plan pratique, ou sur le terrain institutionnel fertilisé par l’idéologie corporative. L’État Nouveau a consenti, en réalité, à une économie libérale moins étatisée que celle que le pays avait connue sous la Première République Portugaise (1910-1926). Cependant, le paradoxe n’est valable que si on le considère sur le plan formel.

L’État Nouveau n’a pas modelé une “économie nouvelle”; mais plutôt imposé une économie dirigée et interventionnée, qui s’est servie de la doctrine corporative afin de créer des institutions régulatrices des conflits d’intérêts. L’État a imposé une myriade d’organismes capables de prévenir des mouvements d’action collective connotés avec la prédication socialiste de la lutte des classes. Néanmoins, aucune de ces déviations et contradictions du système corporatif portugais ne retire aucun intérêt à l’étude des institutions respectives.

Comme l’a souligné Philippe Schmitter, le corporatisme fût la pierre angulaire d’un régime autoritaire «ultra-institutionnalisé» (Schmitter 1999, 104, 132-142). Les chambres obligatoires pour l’agriculture, de l’industrie et du commerce, et aussi les “syndicats corporatifs” des divers secteurs du travail, ont servi l’objectif de l’État de créer un système horizontal de représentation d’intérêts et un réseau vertical et horizontal de contrôle politique du “capital” et du “travail”.

Cette tâche gigantesque et erratique, exécutée conformément à la loi entre 1932 et les dernières années de la Guerre de 1939-1945, a résulté en une imposition de près de trois dizaines d’organismes de coordination économique (dans la pratique, il s’agissait de services publics qui n’avaient rien de corporatif) à des secteurs vitaux de l’exportation et de l’importation de biens agricoles et alimentaires. La substitution partielle des importations de subsistance dont les productions nationales étaient déficitaires de façon chronique et la garantie d’importation de matières-premières indispensables à l’industrie transformatrice a poussé l’État à faire de ces secteurs “stratégiques” et vulnérables à l’impact des crises extérieures des domaines prioritaires d’intervention politique. L’“économie dirigée” s’est ainsi montrée d’autant plus dense que les activités économiques en question ont mobilisé l’État autoritaire à se prévaloir dans une économie politique à tendance autarcique.

Les organismes de coordination économique créés sous l’égide de l’État dans les secteurs primaires et secondaires ont reçu des pouvoirs de “commerce d’État”, taches de la diplomatie économique et prérogatives d’intervention sur les marchés des produits respectifs; des compétences d’arbitrage leur ont été attribuées quant aux conflits intra-sectoriels d’intérêt dans les filières respectives de l’“économie nationale”; des pouvoirs de régulation et de fiscalisation verticale des productions, du commerce et, dans certains cas, de fixation de prix administratifs leur ont été consignés.

Une économie nationale de base corporative?

Une des illusions doctrinaires les plus communes du corporatisme fasciste – un composé d’idées sociales et politiques ayant des nuances nationales, malgré l’influence de l’archétype italien – consiste en la déclaration d’une formule politique supra libérale, capable de sauver le système capitaliste de lui-même et de résoudre la “question sociale” par le biais de formes associatives et spontanées d’organisations d’intérêt.

Dans ses prétentions régénératrices du système capitaliste libéral, la théorie économique corporative a même essayé de lutter en faveur d’un homo corporativus, une nouvelle condition de la nature humaine capable d’assurer un ordre économique et social fondé sur la communion entre l’individu et l’État. Ce dernier argument doctrinal a non seulement permis de réaffirmer la suprématie du concept de l’“économie nationale” – émanant de la vieille école historique allemande d’Economie Politique, notamment de l’œuvre de Friedrich List [7] –, mais a aussi servi à déclarer l’ordre corporatif, la seule formule politique et institutionnelle du “bien-être collectif”.

La grande préoccupation des théoriciens du corporatisme portugais fût la défense du principe de la concurrence imparfaite (Brito 1989, 99-109). Dans cette acception simultanément dogmatique et pragmatique, l’organisation corporative serait l’instrument idéal et nécessaire à un fort interventionnisme de l’État dans la vie économique.

Comme on l’a déjà dit, les doctrinaires les plus importants et prudents du système (pour la plupart, professeurs de Droit des universités de Lisbonne et de Coimbra) ont dénommé cette formule d’organisation oligarchique et autoritaire de l’État et d’intervention dans un système capitaliste atteint par de sérieux problèmes dans le commerce international de biens et de capitaux, “économie dirigée” ou “économie dirigée à base corporative”. De cette façon, la doctrine officielle a cherché à démarquer la relation de l’État Nouveau avec la vie économique des modèles étatisés collectivistes et a essayé de contenir l’enthousiasme des salazaristes qui exaltaient catégoriquement une “économie corporative” inspirée par les théories du fascisme italien [8].

Autoritaire et oligarchique, le système corporatif portugais a offert à l’État en reconstruction un instrument capable de refaire les relations entre le public et le privé et imposer une vaste gamme d’institutions d’intermédiation des intérêts. Comme Salazar lui-même l’a admis, la conciliation arbitrée des intérêts aurait pour finalité de les lier à l’État à travers des négociations oligarchiques qui, en bonne partie, ont commencée à l’intérieur des associations patronales de l’ère libérale. Des accords plus ou moins informels, ont été effectués au cas par cas et conformément aux impacts de la crise du capitalisme dans chaque secteur de la production nationale. Suivant des modèles semblables, bien qu’en sourdine, ces négociations ont suivi leur chemin à l’intérieur des chambres corporatives du “capital” (Grémios), dans les avatars bureaucratiques du conditionnement industriel et aussi dans les couloirs des ministères eux-mêmes (Garrido 2006, 111-178; Garrido 2010).

Ces promesses ainsi que d’autres plus vaines de la doctrine et de la propagande sont finies par être dénoncées par des figures proéminentes du régime salazariste. Dans le cas portugais, divers corporatistes qui durant les années trente s’étaient mis en relief en tant qu’idéologues et doctrinaires, se sont rapidement désillusionnés. Outre la promesse non tenue de l’“État corporatif” – qui ne l’a jamais été, indépendamment de l’existence d’une Chambre Corporative dans le système politique du régime (Ferreira 2009) –, certains salazaristes exempts de toute suspicion ont blâmé le dérapage du système vers les autoritaires (et peu corporatives) fonctions d’intervention de l’État dans l’économie et la collaboration forcée des intérêts dans les institutions de droit public [9].

Économie corporative ou économie institutionnalisée?

Dans la pratique, on doit souligner que, le corporatisme portugais n’a pas créé une économie corporative, mais une économie dirigée ou institutionnalisée. En d’autres termes, ce qui a réellement existé c’est «un ordre économique étatique avec une composante corporative» (Moreira 1997), 232). Cela signifie qu’il n’y a pas eu d’organisation corporative des intéressés, mais plutôt une institutionnalisation des relations sociales et économiques à l’intérieur des entités publiques et semi-publiques imposées par l’État lui-même – organismes de coordination économique, chambres syndicales facultatives et obligatoires et fédérations syndicales, syndicats nationaux, caisses du peuple et des pêcheurs.

Imposition légaliste et bureaucratique, elle fût conduite sans pudeur de cohérence avec les idéaux doctrinaires qui, pour la plupart, exprimaient le “corporatisme des encycliques”, ou l’école sociale-chrétienne de la pensée corporatiste formée au XIXe siècle. Au lieu de ce corporatisme idéal et associatif, dans le domaine économique et social, Salazar a permis la construction peu planifiée d’un corporatisme fasciste et séculaire, autoritaire et bureaucratique, très proche de la synthèse critique de Mihaïl Manoïlesco, des écrits du sociologue autrichien Othmar Spann et, surtout, des économistes italiens Giuseppe Bottai et Ugo Spirito.

Malgré les efforts de certains professeurs portugais, la théorie économique corporative ne s’est jamais affirmée comme modèle (Almodovar and Cardoso 2005), 333-354). À partir de 1949, elle a cohabité comme elle a pu avec le keynésianisme, dont les idées ont commencé à faire école au Portugal.

Éclectique et pragmatique, l’économie corporative portugaise a démontré une composition fragile de références recueillies dans divers courants de la pensée économique. Une synthèse ayant une faible autonomie théorique par rapport au paradigme néoclassique qui avait servi l’ordre économique libéral, dont les notions de concurrence parfaite”, d’“équilibre spontané des marchés” et le “bien-être individuel”, ont été critiquées par les corporatistes de façon véhémente. En outre, au Portugal comme à l’étranger, l’idéologie économique corporative est demeurée attachée à un discours doctrinaire construit autour d’un dogme politique d’“intérêt national”, à la traduction politique de la notion éthique d’“utilité sociale collective”.

Conformément à la vision pragmatique que Salazar a fréquemment exprimée sur le corporatisme, la théorie et les principes du système ont servi, avant tout, à conférer au processus d’institutionnalisation de la vie économique et sociale – la collaboration coercitive des intérêts et la conciliation forcée du “capital” e do “travail” – une logique de rangement qui pourrait être obtenue par la voie législative et bureaucratique.

La réforme budgétaire, fiscale et de crédit imposé en 1928-29 par le ministre des Finances Oliveira Salazar, la révision des mécanismes de protection tarifaire définis en 1929, le conditionnement industriel et la liquidation du syndicalisme associatif ont été les autres instruments de la construction autoritaire d’une économie institutionnalisée de suggestions corporatives. Celle-ci, à son tour, paraît avoir été la cause et l’effet de la construction d’un État autoritaire fortement oligarchique.

Des questions théoriques pour un programme de recherche

Afin de discuter en profondeur de la validité classificatoire de l’expression économie institutionnalisée de suggestions corporatives, il faut la mettre à l’épreuve dans un projet de recherche en histoire des institutions économiques du corporatisme portugais. Les questions fondamentales de ce programme d’études paraissent être les suivantes:
a) Quels liens sont établis entre l’“État corporatif” et l’“économie nationale corporative”?
b) L’institutionnalisation de l’“économie nationale corporative” a signifié une rupture avec les principes et les pratiques de l’économie libérale?
c) Quelles relations existe-t-il entre la théorie économique corporative, la doctrine et l’architecture institutionnelle (le système et l’organisation)?
d) Quels sont les processus typiques de la mise en place de l’ordre économique corporatif?
e) Quels profils institutionnels ont dominé l’économie dirigée portugaise?

L’historiographie sur le corporatisme portugais et la réponse à l’éventail de questions que nous avons posées nous mène à penser que l’institutionnalisation de l’ordre économique corporative et l’action durable et persistante de ses institutions ont concouru de façon décisive à la longévité de la dictature.

De même, l’“économie corporative” a renforcé les liens entre le système politique autoritaire, l’économie dite “nationale” dans ses secteurs les plus faibles et nécessitant de protection et d’une vie sociale très inhibée dans ses mouvements dus à l’asphyxie que le corporatisme oligarchique a exercée sur elle.

Plus qu’insister sur l’histoire des oppositions à l’État Nouveau, une question importante mais insuffisante, et dans l’étude des processus d’ouverture du régime à l’extérieur, l’historiographie de l’État Nouveau pourra rénover son agenda si, au lieu de privilégier les mésaventures de la mémoire, on a l’audace d’aborder l’héritage dictatorial dans sa propre historicité.

Selon cette perspective – soulignant à nouveau que le corporatisme fût la seule idéologie déclarée dans la Constitution de 1933 –, l’étude de l’action concrète des institutions corporatives et para-corporatives devra revenir au premier plan de l’historiographie sur l’État Nouveau portugais. Une place qu’elle a significativement occupée durant ses commencements en tant qu’histoire critique d’un passé qui finalement prescrivait.

Trente-cinq années passées sur la fin de la dictature de Salazar et de Caetano, la connaissance historique de l’État Nouveau insiste à nous présenter la même trilogie de problèmes qui l’a animée dans les années quatre-vingt et quatre-vingt-dix du XXe siècle:
1) Les origines idéologiques et sociales du régime et ses processus d’implantation dans le cadre de la crise de l’État libéral;
2) La nature politique de l’État Nouveau dans le contexte historique des fascismes de l’Europe de l’entre-deux-guerres;
3) L’extraordinaire longévité de la dictature portugaise et sa résistance aux transformations extérieures et intérieures.

S’il est certain que tout rentre dans ce triangle de questions, il n’en est pas moins vrai que la “question corporative”, ou la construction du système corporatif portugais dans ses singularités et ses paradoxes, émerge dans n’importe laquelle de ces problématiques.

L’histoire contemporaine est bien une histoire d’idées en mouvement. Bien qu’elle paraisse statique et structurelle, “l’idée corporative” fût un champ d’essai social et un cadre économique très débattu et controversé: proclamée et aussitôt avilie, essentielle mais fausse, nécessaire néanmoins contingente. L’étudier dans les contextes socio-institutionnels où le corporatisme a été imposé et vécu de façon consentante ou résistante signifie essayer de comprendre l’État Nouveau dans ses structures plus cryptiques et complexes, entre l’idéologie et la pratique, entre le dogme et la vérité.


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Note

1. La longe durée du régime autoritaire Portugais et le rôle central dont les idées et les institutions corporatives ont occupé dans la structure politique du régime, de façon similaire avec António Oliveira Salazar comme chef du Gouvernement (1932-1968), et aussi avec Marcello Caetano (1968-1974), ont connu un étude, déjà classique, par Lucena 1971. Il y a une traduction portugaise: Lucena 1976. Plus récent et plus comparative, voir Pinto, Kallis 2014.

2. Pedro Teotónio Pereira (1902-1972) a été un corporatiste pratique, le principal constructeur des institutions corporatives portugaises des années trente. Nationaliste et syndicaliste, il a eu un rôle crucial dans le processus d’institutionnalisation du corporatisme pendant le temps qu’il était sous secrétaire de l’État des Corporations et de la Providence (1933-1936) et, ensuite, comme ministre du Commerce et Industrie (1936-1937). Sa reconnaissance fut complète au moment qu’il était ambassadeur du Portugal dans l’Espagne de Franco et en outres postes importants de la diplomatie portugaise (Rio de Janeiro, Londres et Washington).

3. L’expression fait partie du titre de l’ouvrage de l’auteur roumain, très diffusé au Portugal : Manoïlesco 1934.

4. En 1974, l’année de la chute de “L’État Nouveau Corporatiste” ils existaient au Portugal 2432 institutions corporatives. La moitié étaient des petits organismes d’encadrement des travailleurs ruraux, les Casas do Povo: Freire et al.  2014, 21.

5. Certaines exceptions ne démentent pas la règle. Dans les domaines de l’agriculture, voir la dissertation de Doctorat en Histoire présentée à l’Universidade Nova de Lisboa par Dulce Freire (2008). Pour les pêches maritimes, voir Garrido 2010.

6. Nous faisons référence, respectivement, à la Constitution de 1933 et à la série de six “décrets corporatifs” du 23 septembre de la même année : Statut du Travail National, Chambres Obligatoires (Grémios, des chambres pour des entreprises), Syndicats Nationaux, Caisses du Peuple (Casas do Povo), Caisses Economiques, Institut National du Travail et de la Prévoyance. Les pêcheurs ont connu leurs propres institutions d’encadrement social en 1937 (Casas dos Pescadores).

7. Système national d’économie politique (traduit du titre en Allemand, 1841).

8. Les auteurs portugais qui se sont le plus efforcés de théoriser l’“économie corporative” furent João Pinto da Costa Leite (Lumbralles), José Joaquim Teixeira Ribeiro et Marcello Caetano, essentiellement un idéologue et un rédacteur de doctrine juridique et administratif : Bastien, Cardoso 2007, 120.

9. Marcello Caetano lui-même, dans un célèbre opuscule, résultant d’une conférence proférée le 23 mars 1950 au Bureau d’Études Corporatives : Posição actual do corporativismo português, Lisboa, Império. Ce Bureau (Gabinete de Estudos Corporativos), institué en 1949, à Lisbonne, a connu des fonctions bien similaires à l’Institut d’études corporatives et sociales fondé en France, en 1934, dont ce grand animateur soit Maurice Bouvier-Ajam. Voir Kaplan 2004.